Richard B-Blog

Le nudge : nouvel allié du marketeur

Publié sur HBR.fr , Dec 2016

Impossible de passer à côté du phénomène du « nudge » (du nom du livre de Richard H. Thaler et Cass R. Sunstein). Fondés sur les enseignements de l’économie comportementale, les nudges ou « incitations douces » viennent renouveler en profondeur les outils du management du changement. Les nudges s’appuient sur la réalité de nos processus de décisions, décryptée par les sciences du comportement. L’économie comportementale challenge les théories économiques classiques en montrant que nos décisions ne sont pas forcément rationnelles, même si nous aimons à le penser. La liste récurrente de nos bonnes résolutions de rentrée (reprendre le sport, finir plus tôt…) suffit à montrer que nous ne sommes pas des super-optimisateurs, alors même qu’il s’agirait de notre propre intérêt. Faute de temps ou de ressource cognitive à y consacrer, mais aussi parce que nos arbitrages quotidiens sont sous l’influence de facteurs non conscients. Les options par défaut, la pression sociale, nos émotions, nos raccourcis mentaux… sont autant d’influences sur lesquelles s’appuient les nudges. Et la recherche académique en a identifié plus d’une centaine. La connaissance de ces facteurs d’influence permet de créer des interventions simples et peu coûteuses favorisant un comportement souhaité.

Avez-vous déjà réutilisé une serviette dans un hôtel ?

Vous-même avez-vous certainement déjà été « nudgés »… Au bureau, par exemple, le distributeur de boissons chaudes, qui vous propose aujourd’hui votre café sans sucre par défaut, vous nudge pour votre santé. La machine vous oblige à faire le choix de la quantité de calories à ajouter. Ou peut-être avez-vous remarqué à l’hôtel un panneau qui vous incite à réutiliser votre serviette « comme 75% des gens ayant occupé cette chambre ». Après avoir conquis le monde des politiques publiques, voici que les nudges envahissent le monde du business. Même si certains principes du nudge sont empiriquement connus des marketeurs, les récentes recherches académiques constituent une opportunité majeure pour renouveler leur boîte à outils. Au risque de bousculer les pratiques dominantes… Car le nudge vient aussi nous rappeler que le marketing est avant tout une affaire de comportement. Et que changer les comportements des clients ne passe pas nécessairement par le réflexe habituel qui consiste en priorité à travailler l’image de sa marque. Il existe d’autres leviers d’influence que le discours publicitaire persuasif. La logique de persuasion qui s’est institutionnalisée avec la télévision et son format « insight / bénéfice / reason-why » voit aujourd’hui son efficacité challengée du fait de la fragmentation des media. Le retour en grâce de l’émotionnel au cœur des campagnes montre aussi le besoin de renouveler les mécaniques rationnelles qui sont trop facilement décryptées par le consommateur. Grâce à son action directe sur les comportements, le nudge apporte une solution alternative sans nécessairement passer par la case copy strategy. Par exemple, avec sa poupée nudge qui change de couleur au soleil, Nivea Brésil apporte une solution aux parents pour les aider à persuader leurs enfants d’utiliser de la protection solaire.

En l’échantillonnant sur les plages, Nivea agit sur le bon lieu et au bon moment : la poupée magique rend visible la menace des UV et le jeu d’imitation fait le reste pour inciter au rituel du crémage. La poupée offerte par la marque nourrit d’abord l’usage, puis la préférence de marque en apportant une solution comportementale sans grand discours (lire aussi la chronique « Et si vous vous serviez des objets pour orienter en douceur les comportements?« ). Ici, c’est donc le comportement qui crée l’attitude.

Découvrez aussi pourquoi de petites idées peuvent avoir de grands effets pour les marques, et comment le nudge peut inspirer une meilleure expérience client dans la chronique complète publiée sur le site de Harvard Business Review France